Une Constance Silencieuse : La Fierté Haïtienne à Travers Quatre Régions (Enquête 2006)

 


A Quiet Constant: Haitian Pride Across Four Regions (2006 Survey)

By Patrick Prézeau Stephenson (Le Français suit)

Question asked in 2006: “How proud are you to be Haitian?” (Scale: 1 = Not at all, 7 = A lot)

The Thread That Holds

Long before the more recent shocks that would redraw daily life in Haiti—earthquakes, political standoffs, spiraling insecurity—an earlier national survey captured something steady beneath the turbulence: a deep, pervasive sense of pride. Even in a year marked by uncertainty, most respondents across every major region chose the very top rung of the pride scale. The emotional center of the national story, it seems, was already resolute: identity as inheritance, obligation, and quiet defiance.

This is not a triumphalist mural. There are pockets of hesitation—more so around the capital, and in stretches of the southern peninsula where hardship bites. Yet the core remains unmistakably firm. Pride here is not a slogan; it is a form of social stamina.

What the Regions Tell Us

  • The North (North / Northwest / Northeast): Home to the Citadelle and layers of revolutionary memory, it stands out. More than eight in ten respondents went straight to the top category. Doubt is sparse.
  • Center–Artibonite: The country’s agricultural backbone shows a tiered pattern. Many respondents cluster just below the summit (levels 6 and 5), but when combined with the top category, a large majority still sits high.
  • West (including Port-au-Prince): Pride remains strong, yet this is where the largest share of “not at all” appears. Daily strain—crowding, economic pressure, insecurity—seems to leave a faint fingerprint.
  • Southern Peninsula (South, Southeast, Grand’Anse, Nippes): Pride is robust but more spread out across the upper-middle steps (5 and 6). It feels layered—weathered by storms, literally and figuratively.

These are tonal shifts, not fractures. The national chorus holds its pitch.

 

High-Level Snapshot

Region

Respondents

“A lot” (Level 7)

Levels 6 + 7 Combined

“Not at all” (Level 1)

Lowest Two (1 + 2)

Narrative Texture

North (North/Northwest/Northeast)

311

81.0%

85.2%

5.5%

5.8%

Concentrated, memory-charged pride

Center–Artibonite

343

41.4%

72.6%

2.9%

7.3%

Layered; many just below the peak

West (incl. capital)

609

61.6%

72.3%

7.7%

12.8%

Urban strain shows in low-end voices

Southern Peninsula

325

49.8%

65.2%

3.4%

12.0%

Spread across upper middle steps

National Total

1,588

58.6%

73.4%

5.3%

10.1%

Strong shared identification

Reading notes: “A lot” is the highest point on the scale. “Levels 6 + 7” captures the broad high end. “Lowest Two” groups the small minority expressing little or no pride.

Why It Matters

Outside Haiti, the national narrative is too often flattened—reduced to collapse, crisis, exodus. These results remind us that internal identity isn’t simply eroded by hardship. Pride, in this context, functions like a cultural tendon: bearing weight, flexing, refusing to snap.

It draws strength from:

  • The audacity of 1804—a permanent counterpoint to subjugation.
  • Everyday mutual aid: remittance networks, church groups, rural kinship webs, market cooperatives.
  • Reinvented cultural expression: rara processions, visual art fashioned from salvage, the layered bilingual play of conversation.
  • The moral imagination of ancestors—invoked in classrooms, songs, and whispered advice.

A Glimpse of Strain

The capital region’s higher share of low-end replies hints at lives stretched thin: time lost to traffic and queues, fear of sudden disruption, widening economic gaps. In the southern peninsula, a more graduated pattern suggests resilience tempered by recurring climatic shocks and relative isolation. Yet neither context dissolves the larger embrace of national belonging.

Limits of the Snapshot

  • Dated Lens: These are 2006 voices—before the 2010 earthquake, subsequent political impasses, intensified insecurity, new migration surges.
  • Scale Simplicity: A numeric ladder can’t capture layered emotions that mingle pride with anger, grief, or guarded hope.
  • Unasked Questions: We don’t see how age, gender, rural/urban transitions, or diaspora networks modulate nuance.

Still, the pattern is unmistakable: pride endures as a civic inheritance.

What a Fresh Survey Could Reveal

Would a post‑earthquake generation register a fiercer, more defiant tone—or a more fatigued one? Have outward migration channels refashioned the meaning of “being Haitian” into something more transnational, less territorial? Do young respondents anchor pride more in culture than in formal institutions? A new wave of listening could tell us.

Echoes from the Ground

“You carry the country even when you can’t carry its weight.”
— A composite sentiment heard again and again in interviews over the years


The Quiet Center

Pride here is not denial. It coexists with fear, frustration, and exhaustion. Yet it offers a frame that says: We are more than the crises that visit us. If policy makers, international partners, and diaspora planners miss that, they miss the social capital that still binds the archipelago of Haitian experience—on the island and abroad.

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Une Constance Silencieuse : La Fierté Haïtienne à Travers Quatre Régions (Enquête 2006)

Par Patrick Prézeau Stephenson


Question posée en 2006 : « À quel point êtes‑vous fier(e) d’être Haïtien(ne) ? »
(Échelle : 1 = Pas du tout, 7 = Beaucoup)

Le Fil Qui Tient

Bien avant les chocs plus récents qui allaient redessiner la vie quotidienne en Haïti — séismes, blocages politiques, insécurité grandissante — une enquête nationale antérieure capturait quelque chose de stable sous la turbulence : un sentiment profond et diffus de fierté. Même dans une année marquée par l’incertitude, la plupart des répondants dans chaque grande région ont choisi le tout dernier échelon de l’échelle. Le centre émotionnel du récit national, semble‑t‑il, était déjà résolu : l’identité comme héritage, obligation, et douce défiance.

Ce n’est pas une fresque triomphaliste. Il existe des poches d’hésitation — davantage autour de la capitale, et dans certains pans de la péninsule sud où les difficultés mordent. Pourtant, le noyau reste fermement identifiable. Ici, la fierté n’est pas un slogan ; c’est une forme d’endurance sociale.

Ce Que Disent les Régions

           Le Nord (Nord / Nord-Ouest / Nord-Est) : Demeure de la Citadelle et de couches de mémoire révolutionnaire, il se distingue nettement. Plus de huit répondants sur dix montent directement au sommet de l’échelle. Le doute est rare.

           Centre–Artibonite : L’épine dorsale agricole du pays révèle un profil étagé. Beaucoup se trouvent juste sous le sommet (niveaux 6 et 5), mais une large majorité se situe tout de même haut lorsqu’on les combine avec le niveau maximal.

           Ouest (incluant Port-au-Prince) : La fierté reste forte, mais c’est ici que l’on observe la plus grande proportion de « pas du tout ». La tension quotidienne — promiscuité, pression économique, insécurité — laisse une fine empreinte.

           Péninsule Sud (Sud, Sud-Est, Grand’Anse, Nippes) : La fierté est robuste mais plus répartie parmi les marches supérieures intermédiaires (5 et 6). Elle semble stratifiée — patinée par les tempêtes, au sens propre comme au figuré.

Ce sont des modulations de ton, non des fractures. Le chœur national garde sa note.

Vue d’Ensemble

Région

Répondants

« Beaucoup » (Niveau 7)

Niveaux 6 + 7 combinés

« Pas du tout » (Niveau 1)

Deux plus bas (1 + 2)

Texture narrative

Nord (Nord/Nord-Ouest/Nord-Est)

311

81,0%

85,2%

5,5%

5,8%

Fierté concentrée, mémoire historique densifiée

Centre–Artibonite

343

41,4%

72,6%

2,9%

7,3%

Étagement : nombreux juste sous le sommet

Ouest (capitale incl.)

609

61,6%

72,3%

7,7%

12,8%

Pression urbaine visible dans le bas de l’échelle

Péninsule Sud

325

49,8%

65,2%

3,4%

12,0%

Répartition sur les marches supérieures intermédiaires

Total national

1 588

58,6%

73,4%

5,3%

10,1%

Forte identification partagée

Notes de lecture : « Beaucoup » est le point le plus élevé de l’échelle. « Niveaux 6 + 7 » regroupe le haut élargi. « Deux plus bas » réunit la petite minorité exprimant peu ou pas de fierté.


Graphique 1



Chaque région montre une majorité au niveau de fierté le plus élevé, le Nord étant le plus concentré en haut et l’Ouest affichant une base légèrement plus large de réponses faibles.

Graphique 2



 Toutes les régions se situent dans la zone haute de l’échelle ; le Nord se détache nettement tandis que les autres sont plus rapprochées.

Pourquoi Cela Compte

À l’extérieur d’Haïti, le récit national est trop souvent aplati — réduit à l’effondrement, la crise, l’exode. Ces résultats rappellent que l’identité interne ne se dissout pas simplement sous les difficultés. La fierté, dans ce contexte, fonctionne comme un tendon culturel : elle porte la charge, se plie, refuse de rompre.

Elle puise sa force dans :
- L’audace de 1804 — contrepoint permanent à la subjugation.
- L’entraide quotidienne : réseaux de transferts, groupes religieux, parentés rurales, coopérations de marché.
- Une expression culturelle réinventée : processions rara, art visuel façonné à partir de rebuts, jeu bilingue stratifié du langage.
- L’imaginaire moral des ancêtres — évoqué dans les classes, les chansons, les conseils murmurés.

Un Aperçu de la Tension

La plus forte proportion de réponses basses dans la région capitale suggère des vies étirées : temps perdu dans les embouteillages et les files, peur de l’imprévu, écarts économiques croissants. Dans la péninsule sud, un profil plus gradué laisse penser à une résilience tempérée par des chocs climatiques récurrents et un relatif isolement. Pourtant, aucun de ces contextes ne dissout l’adhésion plus large au sentiment national.

Limites du Instantané

           Un Regard Daté : Ce sont des voix de 2006 — avant le séisme de 2010, les impasses politiques ultérieures, l’insécurité intensifiée, de nouvelles vagues migratoires.

           Échelle Simplifiée : Une échelle numérique ne saisit pas pleinement les émotions mêlées qui combinent fierté, colère, tristesse ou espoir prudent.

           Questions Non Posées : On n’observe pas ici comment l’âge, le genre, les trajectoires rural–urbain ou les réseaux diasporiques modulent la nuance.

Le motif reste pourtant clair : la fierté persiste comme héritage civique.

Ce Qu’une Nouvelle Enquête Pourrait Révéler

Une génération post‑séisme exprimerait‑elle une tonalité plus farouche, plus combative — ou plus fatiguée ? Les canaux migratoires ont‑ils transformé le sens de « être Haïtien » en quelque chose de plus transnational, moins territorial ? Les jeunes ancrent‑ils davantage la fierté dans la culture que dans les institutions formelles ? Une nouvelle vague d’écoute pourrait répondre.

Échos du Terrain

« Tu portes le pays même quand tu ne peux pas porter son poids. »
— Sentiment composite entendu maintes fois dans des entretiens au fil des années

Le Centre Silencieux

La fierté ici n’est pas déni. Elle coexiste avec la peur, la frustration, l’épuisement. Mais elle offre un cadre qui dit : Nous sommes plus que les crises qui nous visitent. Si les décideurs, partenaires internationaux et architectes de la diaspora manquent cela, ils manquent le capital social qui lie encore l’archipel de l’expérience haïtienne — sur l’île et au-delà.

 

Références

[1] Vanderbilt U. 2006. http://lapop.ccp.ucr.ac.cr/en/expert_mode/mostrarDiccionario?nombreDiccionario=haiti_2006 

[2] Stephenson, Patrick P. 2023.  Une Exploration de la Psyché Haïtienne et du Syndrome de Stockholm. https://prezeau.blogspot.com/2023/11/une-exploration-de-la-psyche-haitienne.html 

[3] Stephenson, Patrick P. 2023. The Relevance of Psychometric Factors in Understanding Haiti's Current Challenges. https://prezeau.blogspot.com/2023/12/psychometric-factors-in-understanding.html 

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